Les instruments de l’Etat
L’Etat du Sénégal a mis en place depuis 2012 un schéma d’intervention des instruments destinés à appuyer les entreprises. Ce mécanisme élaboré dans le cadre du programme Yoonu Yookuté vise à appuyer les entreprises sur le plan technique, financier, mais aussi en leur accordant les garanties nécessaires pour l’obtention de prêts auprès des structures de financement. Parallèlement, certaines structures d’appui mises en place par l’ancien régime ont été dissoutes.
Ce schéma a été revu en 2018 avec la mise en place de la Délégation à l’Entreprenariat Rapide des Jeunes et des Femmes (DER/JF) qui a rejoint le dispositif d’appui. À ce jour, près d’une vingtaine de structures publiques sont recensées.
Les efforts de rationalisation
Depuis 2014, il y a une réelle volonté de la part de l’Etat de rationaliser les interventions des structures d’appui.
- En 2014, certaines agences et fonds à l’instar du FNPJ et de l’ANAMA ont été dissoutes.
- Un partenariat a été noué entre l’ADEPME et l’ANPEJ en juillet 2016 pour rationaliser les interventions des deux structures.
- En septembre 2017, le Président de la République a annoncé la réorganisation institutionnelle du dispositif d’accompagnement des entrepreneurs en même temps que la mise en place de la DER.
- En Février 2020, la DER a signé une convention de partenariat avec le PRODAC, l’ANPEJ & l’ADEPME dans le but d’harmoniser l’intervention des initiatives publiques.
- En juillet 2020, Le Président de la République a rappelé au Gouvernement de procéder à l’évaluation et la mutualisation des structures d’appui.
L’avènement de la DER
Annoncée en septembre 2017 puis lancée en mars 2018, la Délégation à l’Entreprenariat Rapide des Jeunes et des Femmes a eu un effet disruptif sur l’écosystème entrepreneurial Sénégalais. Sa création répondait à un objectif de rationalisation des initiatives publiques dédiées à l’entrepreneuriat des jeunes et des femmes. Son rattachement à la Présidence de la République et sa dotation initiale de 30 Milliards lui ont permis de devenir le principal instrument d’appui de l’Etat à destination des entrepreneurs Sénégalais.
A travers les partenariats stratégiques qu’elle a noués avec différentes structures étatiques, financières et internationales, la DER assume le rôle de locomotive de l’action publique en direction des PME et PMI. Ce rôle est d’ailleurs conforme à sa mission de mutualisation des actions de l’écosystème financier déclinée dans le Plan d’Action Prioritaire PAP II du PSE.
Le plan de riposte contre la pandémie
Dans un contexte pandémique, l’Etat a pris un certain nombre de mesures à caractère fiscal et douanier pour soulager les entreprises. L’Etat a aussi mis à la disposition des entreprises impactées une ligne de financement de 200 Milliards en partenariat avec les banques ainsi qu’une ligne “Kiraay lliggueey” logée au niveau des SFD. Les deux lignes étant partiellement garanties par le FONGIP.
La DER a pris un ensemble de mesures pour appuyer les PME et TPE notamment la suspension des remboursements d’échéance durant la pandémie, mais aussi l’allocation de 2 Milliards au profit des bénéficiaires en difficulté. La Délégation a aussi réservé 1 Milliard pour les entrepreneurs en situation de vulnérabilité.
L’Etat à travers le Programme de Résilience Économique et Social (PRES) a accordé une attention particulière au secteur du tourisme avec la mise en place d’un fonds de 10 Milliards logé à la BNDE à un taux bonifié. Enfin, une enveloppe de 300 Milliards a été allouée à l’apurement de la dette due au secteur privé.
Le défi industriel
La vision industrielle du Plan Sénégal Émergent est de doter notre pays d’une industrie forte et diversifiée, inclusive et durable, moteur de croissance, source de création massive d’emplois et de richesses. D’importants projets à l’instar des plateformes et parcs industriels ainsi que les agropoles ont vu le jour pour promouvoir l’industrialisation du pays, mais les pratiques anticoncurrentielles de certains importateurs combinées aux coûts élevés des facteurs de production ont rendu l’industrie locale peu compétitive et entraîné un désinvestissement progressif depuis les années 1970 (Mansoor, 2019).
L’absence de structure dédiée à l’accompagnement exclusif des PMI est symptomatique d’une promotion industrielle insuffisante. Au demeurant, le secteur agro-alimentaire qui domine l’industrie au Sénégal bénéficie de l’appui des instruments de l’Etat. La DER a accompagné la Laiterie du Berger notamment à travers la structuration de sa chaîne d’approvisionnement. Par ailleurs, une mutualisation des outils entre la DER, le FONSIS et la SAED a permis la mise en place de la rizerie DB food dans la vallée du fleuve Sénégal en 2019.
Le pari de l’économie numérique
Sur le plan financier, les PME TIC ont bénéficié d’un appui substantiel de la DER qui a consacré un fonds de 3 Milliards aux startups sur instruction du Chef de l’Etat. Au niveau législatif, le Sénégal conforte son rôle de leader dans la sous-région en matière de promotion des TIC à travers l’adoption de la loi relative à la promotion et à la création de la startup en janvier 2020. La mise en place du Conseil National du Numérique va renforcer la place du secteur privé dans le processus de prise de décision relevant du secteur. Sur le plan des infrastructures, les chantiers de la première phase du Parc des Technologies Numériques de Diamnadio ainsi que le Mohammed Bin Zayed Entrepreneurship and Innovation Center seront livrés en 2021.
Plusieurs structures d’accompagnement soutiennent les startups au Sénégal. L’incubateur CTIC a joué un rôle considérable dans l’animation et la dynamisation de l’écosystème durant la décennie précédente. L’implantation de nouveaux acteurs à l’instar de la Fondation Mastercard contribuera à structurer davantage l’écosystème. Le secteur de la Fintech au Sénégal mériterait une plus grande attention de la part des décideurs afin de lever les barrières liées à l’absence de statut spécifique pour les startups évoluant dans ce secteur à forte croissance. Enfin, le Sénégal doit davantage accompagner des champions à l’image de Gainde 2000 et Intouch qui ont pu exporter l’expertise Sénégalaise en dehors de l’espace UEMOA.
En définitive, la mutualisation des services financiers et non financiers de l’Etat est un processus qui a démarré depuis 2014. Une étape clé a été franchie avec la mise en place de la DER dont les résultats ont été plébiscités par la Banque Africaine de Développement (BAD) qui a injecté 41 Milliards dans la structure en décembre 2019. Sur le plan financier, la mutualisation des fonds est quasi effective au niveau de la DER qui ventile une partie de ces ressources au niveau des autres instruments de l’Etat. Au demeurant, une certaine dispersion des services non financiers est notée. À ce niveau, un cadrage sera nécessaire pour permettre à la DER d’étendre son leadership aux activités de soutien technique. Les différents instruments publics pourront coexister sous le leadership de la DER qui servira de point d’entrée des entrepreneurs Sénégalais au dispositif d’appui Étatique.